L'immobilier canadien

Lire l'article complet (PDF)open_in_new

Entre résilience sectorielle et défis d'abordabilité

Le secteur immobilier a connu des changements importants ces dernières années. D’abord, une pandémie historique a bouleversé la façon dont les personnes et les organisations travaillent. Ensuite, un environnement inflationniste inédit depuis des décennies a entraîné une forte hausse des taux d’intérêt. En conséquence, le secteur immobilier a été contraint de s’adapter à un contexte en mutation rapide. À l’aube du dernier trimestre 2025, il nous semble opportun de marquer une pause et de réfléchir aux défis et aux opportunités qui se présentent pour cette classe d’actifs très prisée.

Le retour obligatoire au bureau impose une recherche de qualité

Au début de la pandémie, de nombreuses entreprises sont passées au télétravail. Elles ont pu mener à bien leurs projets, leurs employés ont bénéficié d’une plus grande flexibilité sans avoir à se déplacer quotidiennement, et plusieurs d’entre elles ont réduit leurs coûts en diminuant leur espace de bureau. Aujourd’hui, ce balancier semble revenir vers l’équilibre. De récentes données indiquent que le télétravail présente de nombreux défis, notamment son impact sur la courbe d’apprentissage des nouveaux employés, la collaboration au sein des équipes et de l’entreprise, le développement de carrière, la culture organisationnelle et la performance globale.

Le dernier CEO Outlook de KPMG, une enquête menée en 2024 auprès de 1 325 chefs d’entreprises de 11 pays, indique que de nombreuses entreprises ont pris conscience de cette tendance. Une écrasante majorité (83 %) des personnes interrogées s’attendent à un retour complet au bureau dans les trois prochaines années. Bien que cette tendance soit de bon augure pour l’immobilier de bureau, les immeubles ne sont pas tous en mesure d’en tirer profit de la même manière.

Soucieuses de fidéliser leurs employés alors qu’elles commencent à imposer le retour au bureau, de nombreuses organisations créent stratégiquement des environnements de travail dotés d’équipements très demandés. Le récent engouement des locataires pour les immeubles de qualité a creusé l’écart entre les différentes catégories de propriétés, faisant grimper les taux d’inoccupation des immeubles de moindre qualité.

La politique « America First » fait obstacle aux transactions canadiennes

Le marché immobilier n’est pas à l’abri de l’incertitude générale engendrée par les bouleversements de la politique commerciale américaine. Bien que les droits de douane n’aient pas eu d’impact direct et grave au premier semestre 2025, leur simple menace et les changements fréquents de position de l’administration Trump ont eu un effet modérateur sur le volume des transactions immobilières au Canada.

Au premier semestre, toutes les catégories d’actifs sauf deux ont enregistré une baisse par rapport au semestre précédent. Les investisseurs adoptent une approche plus prudente, en particulier à l’égard des propriétés industrielles. Il est raisonnable de supposer qu’une détérioration des relations commerciales aurait un impact correspondant sur la demande d’espaces de fabrication et d’entreposage. Bien que le scénario le plus pessimiste soit peu probable, compte tenu des enjeux importants pour les économies américaine et canadienne, il est clair que de nombreux investisseurs préfèrent attendre avant d’agir.

Il n’est donc pas surprenant que les investisseurs se tournent vers les actifs dans le secteur du commerce de détail, en particulier les commerces de première nécessité; ceux-ci ont démontré leur résilience pendant les périodes de ralentissement économique. Par exemple, les immeubles commerciaux abritant des épiceries et des pharmacies se sont révélés très solides pendant la pandémie de COVID-19. Dans un contexte d’incertitude commerciale et économique élevée, ces immeubles sont à nouveau très prisés des acheteurs et des prêteurs. Le centre commercial de quartier typique, un bâtiment d’un étage avec un vaste stationnement et entouré d’un quartier résidentiel mature, est devenu coûteux à reproduire et donc quelque peu à l’abri d’une vague d’offre, ce qui ajoute à sa relative stabilité. 

Le Canada doit combler de toute urgence son déficit en matière de logement

Un autre thème majeur ayant fait les manchettes ces dernières années concerne le besoin criant de logements. Bien que les augmentations de loyer aient diminué en 2024 par rapport aux sommets de 2023, le marché locatif canadien reste particulièrement tendu. Le rapport sur le marché de l’automne 2024 de la SCHL estime le taux d’inoccupation des appartements locatifs construits à cette fin à 2,2 %, celui du marché des copropriétés étant encore plus bas, à 0,9 %. Malgré une récente amélioration, l’abordabilité du logement demeure un défi pour le Canadien moyen, le loyer mensuel ou les versements hypothécaires absorbant la majeure partie du revenu des ménages à l’échelle nationale.

Pour rétablir l’abordabilité, la SCHL estime que le Canada a besoin de 430 000 à 480 000 nouveaux logements par an d’ici 2035. Avec un taux de construction prévu de seulement 250 000 logements et une population canadienne qui devrait atteindre 44,5 millions d’habitants d’ici 2035, le problème devrait s’aggraver considérablement si l’offre n’augmente pas de manière significative pendant cette période. 

Les décideurs politiques à tous les niveaux de gouvernement peuvent influencer les résultats grâce à diverses stratégies. Par exemple, les politiques qui soutiennent la formation de travailleurs supplémentaires dans le secteur de la construction peuvent remédier à la pénurie de main-d’œuvre, les progrès technologiques dans le domaine de la science des matériaux peuvent potentiellement réduire les coûts de construction et améliorer la productivité, et une planification municipale plus efficace peut raccourcir les délais d’approbation. Pour atteindre ces objectifs, il faudra que les différents niveaux de gouvernement collaborent et se concentrent sur des solutions pratiques. 

Les tendances macroéconomiques créent des vents favorables

En ce qui concerne le second semestre 2025 et au-delà, les investisseurs surveillent de près la courbe des taux d’intérêt, qui a une incidence sur la rentabilité et la valorisation des actifs. Comme les taux d’intérêt à long terme semblent se maintenir à un niveau élevé pendant plus longtemps , ce qui réduit l’écart entre les taux de capitalisation, nous ne prévoyons pas de compression généralisée de ces taux dans un avenir prévisible.

Dans ce contexte économique, les investisseurs seront attirés par les actifs immobiliers générant des flux de trésorerie stables et/ou croissants dans des classes d’actifs bénéficiant de facteurs macroéconomiques et démographiques favorables à long terme. De telles opportunités existent notamment dans les immeubles locatifs spécialisés. Comme nous l’avons souligné, la demande de logements neufs est élevée. Cette tendance est davantage renforcée par l’augmentation de l’âge moyen des premiers acheteurs et la croissance des ménages composés d’une seule personne.

Le marché industriel est une autre classe d’actifs soutenue par des tendances à long terme. Même s’il a ralenti après une croissance importante pendant la pandémie et qu’il est confronté à l’incertitude due aux politiques commerciales, il demeure bien placé pour tirer profit de développements à long terme, comme l’adoption croissante du commerce électronique, les investissements dans les technologies visant à améliorer l’efficacité logistique et les changements dans les chaînes d’approvisionnement mondiales qui poussent les entreprises à privilégier des processus d’approvisionnement locaux. 

Une approche stratégique pour naviguer dans un marché en évolution 

En résumé, le marché immobilier canadien continue d’être influencé par des facteurs macroéconomiques tels que l’incertitude liée à la politique commerciale, l’évolution des préférences des investisseurs et un besoin criant de logements. Bien que le marché ait fait preuve de résilience, en particulier dans le secteur du commerce de détail de première nécessité et des logements locatifs spécialisés, les propriétés industrielles doivent composer avec la volatilité découlant des relations commerciales.

Par ailleurs, le défi persistant de l’abordabilité du logement fait ressortir la nécessité d’adopter des politiques publiques stratégiques et d’innover dans le secteur de la construction, dans un contexte où la population canadienne augmente rapidement et où l’écart entre l’offre et la demande se creuse. 

Les changements démographiques à long terme, comme le vieillissement de la population et l’augmentation du nombre de ménages composés d’une seule personne, renforcent encore davantage la demande de nouveaux logements locatifs et d’approches novatrices en matière de développement résidentiel. 

Face à ce contexte dynamique, nous comptons sur une équipe de gestionnaires actifs qui possèdent une expertise approfondie du marché immobilier canadien. Leur approche concrète leur permet de repérer les occasions qui se présentent tout au long des cycles du marché et dans toutes les classes d’actifs, en tirant parti des tendances cycliques et séculaires. Grâce à sa veille constante des dernières évolutions et à la rigueur de sa stratégie d’investissement, iAGMA est en mesure de saisir les tendances émergentes au profit de ses clients.

Mathieu Arpin

Vice-président, placements et gestion d'actifs immobiliers

Lire la bio east