Macro & Stratégie - Janvier 2025

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Perspectives 2025 : le monde et les temps changent

Le début de 2025 marque un moment décisif dans le paysage économique mondial. Les enjeux sont considérables : Donald Trump retourne à la MaisonBlanche, la Chine compose avec des vents contraires internes et externes, l’Europe s’efforce d’équilibrer réformes et durabilité fiscale, et les banques centrales repensent leurs cadres politiques. Les marchés sont aux prises avec des questions de rotation, de résilience et de prise de risque, forçant les investisseurs à s’adapter à un environnement complexe et en évolution rapide.

La présente analyse explore cinq questions clés pour l’année à venir et avance une sélection de recommandations d’investissement, y compris des positions à contre-courant pour ceux qui sont prêts à saisir les occasions qui se présentent.

Trump 2.0 : à quoi faut-il s’attendre ?

Lorsque Donald Trump a pris ses fonctions pour la première fois en 2017, le monde s’est préparé à des bouleversements — et il y en a eu beaucoup. Son second mandat arrive cependant dans un contexte différent. Avec un mandat solide après avoir remporté le vote populaire et bénéficiant de (courtes) majorités au Sénat et à la Chambre des représentants, Trump est prêt à faire avancer un programme ambitieux.

Réglementation, réglementation et impôts

Comme discuté le mois dernier, le premier objectif économique de l’administration Trump 2.0 est de libérer le potentiel économique des États-Unis par la déréglementation et les réformes fiscales. Trump joint jusqu’à présent le geste à la parole, ayant déjà nommé des adeptes de la ligne dure et des sceptiques de la réglementation à la plupart des postes administratifs clés; nous nous attendons à ce que le Congrès approuve la plupart, sinon la totalité, de ses nominations. Sur le front fiscal, il est attendu que la loi de 2017 sur les réductions d’impôts et l’emploi (le Tax Cuts and Jobs Act) sera prolongée, avec l’espoir de stimuler davantage l’économie, d’attirer plus d’investissements nationaux et étrangers, et d’améliorer la compétitivité des entreprises américaines sur la scène mondiale.

Nous anticipons que le taux d’imposition des sociétés soit à nouveau réduit, de 21 % à 15 %, poussant les marges bénéficiaires des entreprises américaines à la hausse (le bénéfice par action 2025 du S&P 500 serait de 10 $, soit une hausse de près de 4 %). La déréglementation généralisée devrait également soutenir des secteurs comme les banques et l’énergie, stimulant la croissance réelle du PIB en 2025 et au-delà.

Réduction de la taille du gouvernement

L’une des ambitions les plus audacieuses de Trump est de réduire la taille du gouvernement fédéral en rationalisant divers départements et agences à travers le Département de l’efficacité gouvernementale. Cela dit, cette initiative devrait faire face à d’importants défis juridiques. En vertu de l’Impoundment Control Act de 1974, adopté sous la présidence de Nixon, le président est légalement tenu de dépenser les fonds alloués par le Congrès. Ainsi, toute tentative de réduire significativement les dépenses gouvernementales sans l’approbation du Congrès pourrait conduire à une myriade de batailles juridiques, et la majorité républicaine au Congrès pourrait finalement s’avérer trop mince.

Nous avons de sérieuses réserves quant à l’objectif d’Elon Musk de réduire le budget gouvernemental de 2 000 milliards $ US (sur un budget total de 6 800 milliards $ US), une cible que les dirigeants du Département de l’efficacité gouvernementale, Musk et Vivek Ramaswamy, ont suggéré pouvoir atteindre en licenciant 75 % des fonctionnaires fédéraux, une proposition susceptible de se heurter à une vive opposition à Washington.

Comme le montant combiné des dépenses de sécurité sociale, de Medicare, de Medicaid et de la défense avoisine les 3 600 milliards $ US, le potentiel de réductions massives des dépenses gouvernementales reste limité. Le consensus actuel du marché suggère que le gouvernement américain pourrait supprimer certaines fonctions, recruter davantage d’analystes de données pour améliorer l’efficacité de la prise de décision, et investir davantage dans la détection des fraudes. Si tel est effectivement le résultat du Département de l’efficacité gouvernementale, nous envisageons des économies de l’ordre de 100 à 200 milliards $ par an, ce qui représente un frein nettement moins important sur le PIB américain.

Tarifs douaniers et politique commerciale : la carte joker

Les tarifs douaniers et la politique commerciale constituent LA grande inconnue dans nos perspectives. Bien que notre première hypothèse soit que Trump utilise les menaces de tarifs envers ses alliés principalement comme prélude aux négociations à venir, nous nous attendons fermement à ce que l’Europe (par le biais de son industrie automobile) et la Chine (tarifs généralisés) soient durement touchées et probablement amenées à riposter, entraînant une baisse du commerce mondial et de la croissance.

Cependant, l’impact intérieur de ces politiques reste incertain. Au départ, la croissance américaine serait initialement soutenue par l’encouragement des investissements dans les industries locales et la réduction de la dépendance aux biens étrangers, mais le commerce mondial a la capacité de s’adapter rapidement à toute force perturbatrice. Le résultat probable est que les échanges seront réorientés par l’entremise des partenaires commerciaux amis, compensant partiellement les effets des tarifs douaniers, et que la facture restante sera largement refilée aux consommateurs, ce qui stimulerait l’inflation.

La question clé est de savoir si les avantages de la protection des industries locales et de la stimulation de la croissance l’emporteront sur les pressions inflationnistes et les tensions commerciales potentielles. Nous prévoyons que la croissance américaine sera légèrement soutenue par ces mesures en 2025, mais que l’inflation augmentera de façon notable, ce qui inciterait la Fed à rester en retrait (nous y reviendrons) et ajouterait une pression à la baisse sur la croissance.

En résumé : Nous nous attendons à ce que le Canada échappe au plus fort des tarifs douaniers, car les ÉtatsUnis ont besoin du pétrole et du gaz canadiens, et les déclarations concernant la sécurité frontalière ne s’appliquent pas de la même manière au Mexique et au Canada. Nous reconnaissons toutefois l’existence d’un scénario peu probable, mais à fort impact, où l’équipe de Trump imposerait des tarifs généralisés de 25 % sur les exportations canadiennes, ce qui plongerait l’économie canadienne en récession.

Selon nous, il s’agit davantage d’une question de négociation que d’une véritable politique économique, et le Canada pourra probablement négocier une sortie de cette menace en augmentant ses dépenses pour la sécurité frontalière et en s’engageant à accroître son budget de défense (et, probablement, à acheter davantage d’équipements militaires aux États-Unis).

Au final, en l’absence de différend commercial avec les États-Unis, nous pensons que ce qui est favorable à l’économie américaine l’est probablement aussi pour l’économie canadienne, et qu’il y a des raisons pour les Canadiens d’être optimistes pour 2025.

La Chine peut-elle apporter les stimuli et les réformes nécessaires ?

La Chine entame 2025 comme un pays à la croisée des chemins. Autrefois moteur de la croissance mondiale, elle fait désormais face à des défis croissants, tant sur le plan intérieur qu’international.

Une récession de bilan

Dans notre analyse de novembre, nous avons identifié le principal problème économique de la Chine comme une « récession de bilan », où les ménages et les entreprises privilégient le remboursement de leurs dettes plutôt que les dépenses ou les investissements, conduisant à une stagnation économique attribuable à une baisse de la consommation et de l’investissement. La situation est davantage compliquée par la crise immobilière en cours, où des milliards de dollars sont immobilisés dans des projets inachevés. Ce contexte délicat ne laisse pas seulement les propriétaires et les investisseurs dans l’incertitude, mais freine également l’activité globale, car les ménages privilégient l’épargne plutôt que les dépenses.

Dans un tel environnement, les mesures de politique monétaire traditionnelles sont insuffisantes, et les coupures de taux de la banque centrale deviennent des coups d’épée dans l’eau. L’histoire montre plutôt que la relance budgétaire directe est la solution la plus efficace.

La Chine revient-elle à son pragmatisme ?

En 2025, nous prévoyons que le gouvernement chinois retrouvera ses habitudes pragmatiques et jouera un rôle proactif en empruntant et en dépensant pour stimuler l’économie. Un axe prioritaire devrait être l’achèvement des projets immobiliers en suspens, ce qui stabiliserait le marché immobilier en plus de renforcer la confiance et les dépenses des consommateurs. De plus, nous anticipons des investissements ciblés dans les secteurs alignés sur les priorités à long terme du gouvernement, comme l’énergie verte et les technologies avancées.

Face au problème de la faible confiance des consommateurs, nous prévoyons que la Chine mettra en œuvre des politiques stimulant directement les dépenses. Cela pourrait inclure des transferts directs (ou, en jargon économique, de « la monnaie hélicoptère ») et d’autres mesures conçues pour encourager les ménages à dépenser plutôt qu’à épargner, contribuant ainsi à la reprise économique et à la croissance.

Enfin, nous prévoyons que le gouvernement fédéral chinois accélérera son programme d’échange de dettes et réformera le modèle économique des gouvernements locaux, supprimant l’incitation actuelle non durable qui consiste à vendre toujours plus de terrains pour des projets immobiliers. Cela aiderait à diversifier l’économie au-delà de l’immobilier.

Notre analyse sur la Chine est donc qu’il existe une stratégie efficace pour sortir de la récession de bilan, mais qu’il faudra une politique budgétaire audacieuse et coordonnée pour atteindre la vitesse d’échappement.

Nous pensons que la Chine, en se concentrant sur la relance budgétaire et les investissements ciblés, peut surmonter ses difficultés économiques actuelles et préparer le terrain pour une croissance durable.

Les occasions d’investissement

Malgré les défis, la Chine offre des secteurs intéressants pour les investisseurs à la recherche de risque et à contre-courant.

Les actions chinoises ont, discrètement, mieux fait que le S&P 500 et le NASDAQ à un certain moment en 2024 et pourraient continuer à rattraper leur retard si les autorités chinoises concrétisent les stimuli et les réformes évoqués ci-dessus. Le marché boursier chinois se négocie à une valorisation attrayante, et l’écart vis-à-vis les actions mondiales pourrait s’avérer intéressant pour les investisseurs cherchant à tirer profit d’un potentiel de hausse

À un niveau plus détaillé, les secteurs alignés sur les priorités gouvernementales, comme l’énergie verte et les technologies avancées, sont propices à l’exploration :

Énergie verte : la domination de la Chine en matière de technologie solaire et de batteries offre un potentiel de croissance à long terme. Le pays est le plus grand producteur de panneaux solaires et de batteries, et son engagement à réduire les émissions de carbone assurera des investissements et des innovations continus dans ce secteur.

Technologies avancées : les secteurs de l’intelligence artificielle (IA) et des semiconducteurs bénéficient d’un soutien étatique solide. La Chine vise à devenir un leader mondial de l’IA d’ici 2030, et oriente des financements gouvernementaux substantiels vers la recherche et le développement dans ce domaine. De même, l’industrie des semi-conducteurs reçoit des investissements significatifs pour réduire la dépendance à la technologie étrangère et renforcer l’autosuffisance.

Terres rares : la Chine possède une part importante des composants qui sont nécessaires aux technologies modernes, notamment les terres rares essentielles à la fabrication d’électronique, de véhicules électriques et d’équipements militaires. L’importance stratégique de ces matériaux assure que les entreprises impliquées dans leur extraction et leur transformation continueront à jouer un rôle clé dans la chaîne d’approvisionnement mondiale

En résumé : bien que la Chine fasse face à d’importants défis économiques, elle constitue une avenue intéressante pour les investisseurs en quête de risque.

Des risques subsistent, mais le potentiel de hausse des actions chinoises et des industries stratégiques présente un argument convaincant pour l’investissement à contre-courant.

Le succès des autorités chinoises dépendra fortement de la mise en œuvre rapide et efficace des politiques budgétaires et des réformes, mais aussi de facteurs externes, tels que les tendances économiques mondiales et les tensions géopolitiques.

Le suivi des changements dans la confiance et les habitudes de dépense des consommateurs sera essentiel pour évaluer le succès des mesures de relance. La santé économique à long terme de la Chine dépend de l’équilibre entre les solutions à court terme par l’entremise de la relance budgétaire et de l’investissement dans une croissance durable.

Europe : occasion ou piège de valeur ?

L’Europe entame 2025 sous tension, prise entre les pressions externes des États-Unis et les défis internes découlant des contraintes budgétaires et de l’instabilité politique. Certains voient l’Europe comme un piège de valeur — une région affligée par une faible productivité, un déclin démographique et une unité fracturée —, alors que d’autres estiment que ces défis pourraient déclencher des réformes jetant les bases d’une croissance à long terme.

Risques commerciaux : un front renouvelé avec les États-Unis

Le retour de Donald Trump à la Maison-Blanche a ravivé les tensions commerciales, particulièrement avec les économies européennes fortement exportatrices. Le risque principal demeure celui des tarifs douaniers, Trump ayant menacé d’imposer des tarifs de 10 % à 20 % sur les exportations automobiles européennes, ce qui pourrait coûter à l’Allemagne et à la France entre 0,5 % et 1,0 % de PIB annuel. Il existe également un risque de guerre commerciale plus large, compte tenu des enquêtes américaines sur les taxes numériques et les subventions industrielles européennes. Ce risque pourrait conduire à des mesures tarifaires plus larges, touchant des secteurs comme la machinerie, la chimie et les biens de consommation.

La réponse de l’Europe dépend de sa capacité à faire appel aux instincts de négociateur de Trump. Les dirigeants européens ont augmenté leurs dépenses en matière de défense pour respecter les engagements de l’OTAN et soulignent l’importance stratégique des liens transatlantiques. Cela dit, si les négociations échouent, l’Union européenne (UE) pourrait recourir à des tarifs de représailles, exacerbant l’incertitude économique.

Défis budgétaires : équilibrer croissance et stabilité

Le paysage budgétaire de l’UE est sous pression. La guerre en Ukraine a étiré les budgets à l’échelle du continent, de nombreux pays apportant une aide significative à Kiev. Leurs engagements potentiels de soutien financier et militaire supplémentaire totalisent de 50 à 100 milliards d’euros sur les deux prochaines années, mais ils doivent aussi s’assurer de pouvoir se défendre ET d’augmenter leurs dépenses militaires pour atteindre l’objectif de l’OTAN de 2 % du PIB.

Parallèlement, d’importants défis budgétaires internes se profilent :

  • Le vieillissement de la population et la faible croissance de la productivité érodent la durabilité budgétaire à long terme.
  • Les efforts pour stimuler l’industrie européenne de la défense, défendus par la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, font face à des contraintes de financement.
  • Le besoin de solutions de financement créatives, comme les obligations communes de l’UE, gagne du terrain mais reste politiquement clivant.

France : un baromètre de la stabilité européenne

Le paysage politique français jouera un rôle central dans l’évolution de l’UE en 2025. Le gouvernement du président Emmanuel Macron fait face à des défis croissants sur plusieurs fronts :

  • Troubles intérieurs : les manifestations persistantes contre les réformes de la retraite et du droit du travail ont affaibli la popularité de Macron, alimentant le mécontentement de la population. Les grèves ont perturbé des secteurs clés, des transports à l’énergie, créant des vents contraires économiques.
  • Montée du populisme : l’extrême droite sous Marine Le Pen continue de gagner du terrain, les sondages suggérant une course plus serrée lors des prochaines élections. Cette vague montante de nationalisme pourrait remettre en question la position traditionnellement pro-UE de la France, compliquant les négociations sur les politiques collectives de l’UE
  • Leadership géopolitique : malgré les problèmes intérieurs, Macron reste un fervent défenseur d’une intégration européenne plus forte, particulièrement dans les initiatives de défense et de climat. La capacité de la France à maintenir son rôle de leader au milieu des turbulences internes sera cruciale pour la cohésion de l’UE.

La grande question en 2025 sera de savoir si d’autres pays, comme l’Allemagne, traversent leur propre crise politique. Cela assombrirait davantage les perspectives de performance économique de l’Europe.

Perspective à contre-courant : le potentiel à long terme de l’Europe

Malgré les vents contraires, l’Europe pourrait offrir des possibilités cachées pour les investisseurs qui sont prêts à voir au-delà de l’incertitude à court terme :

  • Marchés sous-évalués : les actions européennes se négocient à des prix inférieurs par rapport à leurs homologues américaines, présentant un point d’entrée attrayant pour les investisseurs axés sur le long terme.
  • Réformes structurelles : les pressions politiques et économiques pourraient en fait s’avérer positives à long terme pour l’économie européenne si elles déclenchent des réformes dans des domaines tels que les marchés du travail, la politique industrielle et l’énergie verte.
  • Transition écologique : le Pacte vert pour l’Europe, soutenu par des engagements d’investissement de 1 000 milliards d’euros sur la prochaine décennie, est une pierre angulaire de la stratégie de croissance de l’Europe. Des secteurs comme les énergies renouvelables, la technologie des batteries et les véhicules électriques sont bien positionnés pour en bénéficier.

En résumé : l’Europe fait face à plusieurs risques significatifs qui pourraient affecter sa stabilité économique. La fragmentation politique persistante menace de saper les politiques à l’échelle de l’UE et de freiner la croissance.

De plus, une aggravation de la guerre commerciale avec les États-Unis pourrait amplifier les pressions récessionnistes dans des économies clés. L’instabilité politique en France, particulièrement avec la montée potentielle de l’influence de Le Pen, pourrait avoir des répercussions sur tout le continent. Ces facteurs représentent collectivement des défis mais pourraient aussi poser les bases de changements nécessaires.

Bien que nos perspectives pour l’Europe en 2025 demeurent prudentes, nous gardons l’esprit ouvert et portons une attention particulière aux actifs européens dont la valorisation est attrayante.

La Fed et la Banque du Canada : jusqu’où iront les baisses ?

La politique monétaire demeure au cœur des dynamiques de marché de 2025, alors que la Réserve fédérale et la Banque du Canada font face à la tâche délicate de gérer la résilience économique tout en surveillant les pressions inflationnistes. Alors que les marchés anticipent des coupures de taux, le débat sur l’ampleur et le rythme de celles-ci a des implications cruciales pour les économies, les devises et la valorisation de leurs actifs.

La Réserve fédérale : équilibrer croissance et inflation

La Réserve fédérale aborde l’année 2025 avec une économie américaine relativement solide, soutenue par des dépenses de consommation et des investissements robustes de la part des entreprises. Malgré tout, la trajectoire de la politique monétaire demeure incertaine, façonnée par des forces opposées :

  • Politique commerciale : le président élu Trump a clairement exprimé son intention d’utiliser les tarifs douaniers pour financer le service de la dette américaine et a commencé à reconnaître, dans ses récentes entrevues, que cette politique devrait être inflationniste. En fonction des choix politiques retenus, et surtout de la nature et de l’ampleur des représailles des partenaires commerciaux, la Réserve fédérale pourrait être contrainte d’interrompre précocement les baisses de taux, voire de revenir à des hausses en cours de route.
  • Le débat sur le taux neutre : les discussions autour du taux d’équilibre — ce point de référence théorique de la politique monétaire — mettent en lumière la complexité de la situation actuelle. Les gains de productivité, portés par la numérisation et l’automatisation, soulèvent la question d’un taux neutre potentiellement supérieur aux niveaux historiques. Les dernières estimations du Comité de politique monétaire américain (FOMC) situent le taux neutre entre 2,5 % et 3,5 %, suggérant une marge de manœuvre limitée pour un assouplissement monétaire significatif.
  • Attentes des marchés et signaux de la Fed : dans le dernier droit de 2024, les marchés anticipaient une baisse de taux d’environ 25 points de base pour 2025. Toutefois, avec des prévisions d’inflation bien ancrées et une politique budgétaire qui demeure expansionniste, la Réserve fédérale pourrait privilégier une approche plus prudente. Tout écart par rapport aux attentes du marché risquerait d’entraîner une correction importante sur les marchés des devises, des titres à revenu fixe et des actions
  • Autres facteurs à surveiller : les pressions inflationnistes à la hausse, notamment celles liées aux prix de l’énergie ou aux perturbations de l’offre, pourraient contraindre la Réserve fédérale à suspendre ou inverser son cycle de coupures de taux, maintenant ainsi des conditions monétaires plus restrictives que prévu.

L’exercice d’équilibre délicat de la Réserve fédérale — soutenir la croissance tout en maîtrisant l’inflation et en préservant la stabilité financière — constituera un facteur déterminant pour l’orientation des flux financiers mondiaux.

La Banque du Canada : un exercice d’équilibriste

La Banque du Canada (BdC) fait face à un ensemble de défis bien distincts. Bien que l’économie canadienne bénéficie d’exportations solides de matières premières et d’une situation budgétaire relativement stable, d’importantes vulnérabilités structurelles persistent.

Premièrement, avec un niveau d’endettement des ménages parmi les plus élevés du G7, le marché immobilier canadien reste particulièrement sensible aux variations de taux d’intérêt. La hausse des taux ces dernières années a ralenti l’activité immobilière, mais les cinq coupures consécutives de 2024 (dont deux baisses majeures de 50 points de base en fin d’année) pourraient raviver les craintes d’une résurgence de l’inflation dans l’habitation. Nous restons sceptiques quant à une flambée des prix de l’immobilier en 2025, compte tenu des récents changements dans la politique d’immigration du Canada qui devraient modérer la demande de logements. Cependant, nous gardons l’esprit ouvert.

Deuxièmement, contrairement aux États-Unis, l’économie canadienne, plus modeste et plus dépendante des exportations, est particulièrement exposée aux fluctuations des taux de change. Le dollar canadien (CAD) s’est déprécié face au dollar américain (USD) en 2024, en raison de l’écart croissant entre les performances économiques perçues et réalisées des deux pays. 

Cependant, en cette fin d’année, nous estimons que beaucoup de mauvaises nouvelles sont déjà intégrées dans les cours, et que le huard pourrait, en fait, constituer une occasion d’achat à contre-courant intéressante. Néanmoins, la BdC doit soigneusement calibrer son message et ses actions dans les trimestres à venir pour éviter la perception d’un décalage excessif vis-à-vis la politique de la Réserve fédérale, ce qui pourrait accentuer la faiblesse et la volatilité du CAD.

Troisièmement, l’inflation canadienne a ralenti plus rapidement que nos attentes et que ce qui a été observé dans d’autres pays. La croissance, quant à elle, devrait reprendre et atteindre entre 1,5 % et 2,0 % en 2025, légèrement en dessous de son taux à long terme. Face aux risques importants d’une inflation inférieure aux objectifs, la BdC devra déterminer si elle doit passer sous sa fourchette neutre estimée de 2,25 % - 3,25 %, ou si elle peut se permettre de se maintenir dans cette fourchette tout au long de 2025.

En résumé : Les politiques des banques centrales en 2025 jouent un rôle clé dans les dynamiques de marché, la Réserve fédérale et la Banque du Canada devant gérer la résilience économique et les pressions inflationnistes. L’exercice d’équilibre de la Fed entre croissance et inflation, influencé par les politiques commerciales et le débat sur le taux neutre, contraste avec les défis de la BdC concernant la gestion des sensibilités du marché immobilier et des fluctuations des taux de change. Les investisseurs devraient être attentifs aux occasions sectorielles en actions, à la valeur relative dans le revenu fixe et aux occasions tactiques sur les devises, particulièrement concernant le CAD.

L’efficacité des politiques des banques centrales dépendra, comme toujours, de leur exécution et de leur communication opportune. Cependant, la politique commerciale pourrait finalement constituer le facteur déterminant.

Actions : rotation mondiale/sectorielle ou domination américaine/technologique ?

Depuis plus d’une décennie, les actions américaines et les géants technologiques règnent en maîtres, générant des rendements exceptionnels et consolidant leur position de leaders des marchés mondiaux. Cependant, à l’aube de 2025, la question qui s’impose est celle-ci : le paysage est-il en train de changer ?

Actions américaines : la fin de la domination des géants technologiques ?

Les « Sept Magnifiques » de la technologie — des mastodontes comme Apple, Microsoft et Nvidia — ont largement contribué à la performance du S&P 500 ces dernières années. Bien que leurs fondamentaux et leurs flux de trésorerie restent attrayants, le récit narratif d’une domination sans limite est menacé.

Après une autre année de forte performance en 2024, la convergence des bénéfices pourrait rattraper le marché. Le consensus s’oriente vers un resserrement de l’écart de croissance des bénéfices entre les leaders technologiques et les 493 autres entreprises du S&P, les marges des sociétés technologiques subissant la pression de la hausse des coûts tandis que les entreprises américaines bénéficient des baisses d’impôts.

Les inquiétudes concernant les valorisations se font également sentir. Les grandes capitalisations technologiques continuent de se négocier à des multiples élevés, avec un ratio cours-bénéfice prévisionnel dépassant 30x, comparativement à 22x pour l’ensemble de l’indice S&P 500. La pérennité de cet écart dans un environnement de taux d’intérêt plus élevés pourrait devenir un sujet de préoccupation au cours de l’année. Les risques réglementaires ajoutent une couche supplémentaire d’incertitude, les actions antitrust aux États-Unis et à l’étranger pouvant entraver les trajectoires de croissance des principales entreprises technologiques.

Cela dit, le marché américain demeure résilient. Son dynamisme inégalé, son économie alimentée par la consommation et sa domination dans l’innovation font en sorte qu’il restera une pierre angulaire des portefeuilles mondiaux.

Marchés actions mondiaux : des occasions sectorielles

En 2025, nous pourrions assister à l’élargissement du leadership de marché alors que la rotation sectorielle prend de l’ampleur.

Énergie et industrie : bien qu’exposés au risque d’une remise en cause de l’Inflation Reduction Act par l’administration Trump aux États-Unis, ces deux secteurs devraient bénéficier des récentes incitations gouvernementales et des investissements privés dans la décarbonation et les infrastructures à l’échelle mondiale. Des initiatives gouvernementales à travers le monde, comme les Programmes d’infrastructures vertes du Canada et le Pacte vert pour l’Europe, ont catalysé des milliards dans les projets d’énergie propre et devraient gagner en dynamisme en 2025. De plus, l’élan vers les sources d’énergie renouvelable et les pratiques industrielles durables devrait stimuler une croissance significative dans ces secteurs, alors que les entreprises et les gouvernements investissent dans des technologies réduisant l’empreinte carbone et améliorant l’efficacité énergétique.

  • Finance : les banques et assureurs mondiaux sont bien positionnés pour tirer parti des écarts de taux d’intérêt plus élevés, malgré quelques inquiétudes persistantes sur la qualité du crédit dans certaines économies en ralentissement. Avec des banques centrales mondiales s’orientant vers des baisses de taux plus synchronisées, l’accentuation des courbes de taux d’obligations souveraines devrait bénéficier aux banques grâce à des marges d’intérêt nettes plus élevées et une activité de prêt accrue.
  • Santé : après une année défavorable pour la santé, les thèmes du vieillissement de la population mondiale et l’accent accru sur l’innovation biotechnologique continuent d’offrir des possibilités de croissance dans plusieurs régions. Les avancées en technologie médicale et pharmaceutique, la demande croissante de services de santé, et le développement de la médecine personnalisée et des services de télésanté, entre autres, offrent des perspectives intéressantes. De plus, l’augmentation des dépenses de santé par les gouvernements et les entités privées devrait soutenir l’expansion des infrastructures et services de santé, faisant de ce secteur un domaine clé pour l’investissement à long terme.

Marchés émergents : une croissance portée par les réformes

Après une longue période de sous-performance, le moment est venu d’examiner de plus près les marchés émergents, qui effectuent un retour discret. Des réformes au sein de régions clés donnent lieu à des créneaux d’investissement intéressants, particulièrement dans les secteurs liés aux matières premières, à l’énergie, aux infrastructures et à la consommation.

Les pays exportateurs de matières premières comme le Brésil et l’Arabie saoudite tirent des avantages significatifs de la hausse des prix de l’énergie et des investissements dans les technologies de décarbonation. Ces développements dynamisent leurs économies et les positionnent comme acteurs majeurs du marché mondial de l’énergie. Au Brésil, l’accent mis sur les biocarburants et les énergies renouvelables vient compléter ses exportations traditionnelles de pétrole ; en Arabie saoudite, le plan Vision 2030 stimule les investissements dans l’énergie solaire et éolienne, alors que le pays s’efforce de diversifier son économie et de réduire sa dépendance au pétrole.

L’ambitieux plan d’infrastructures indien de 1 200 milliards de dollars, conjugué à la volonté de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ANASE) de renforcer la connectivité régionale, crée des occasions substantielles pour les investisseurs de long terme.

Ces initiatives comprennent des projets majeurs d’autoroutes, de chemins de fer et de développement urbain, qui devraient stimuler la croissance économique et le développement dans toute la région. Au sein de l’ANASE, des États membres comme l’Indonésie, la Thaïlande et le Vietnam privilégient les infrastructures pour améliorer les liens commerciaux et renforcer l’intégration économique, conférant à la région un attrait pour l’investissement.

En outre, des pays comme l’Indonésie et le Vietnam voient la hausse des revenus et l’urbanisation alimenter la croissance du secteur de la consommation. L’expansion de la classe moyenne dans ces pays stimule la demande pour une vaste gamme de biens et services, offrant ainsi des occasions prometteuses tant pour les entreprises que pour les investisseurs. En Indonésie, la croissance du commerce électronique et des services numériques transforme le paysage du commerce de détail, tandis qu’au Vietnam, l’urbanisation croissante entraîne une demande accrue de logements, d’éducation et de services de santé. Ces tendances démographiques devraient soutenir une croissance robuste du secteur de la consommation dans les années à venir.

Les marchés émergents se négocient également à un prix inférieur par rapport aux marchés développés. Cet écart de valorisation, associé aux vents porteurs structurels, fait des marchés émergents un pari à contre-courant attrayant pour 2025.

En résumé : pour 2025, le paysage d’investissement est marqué à la fois par des risques et des possibilités. Les incertitudes macroéconomiques, des tensions géopolitiques aux pressions inflationnistes, devraient entraîner des périodes de volatilité accrue. Mais cet environnement crée également des occasions pour les investisseurs disciplinés, et de nombreuses zones géographiques et secteurs sont bien positionnés pour bénéficier des écarts de valorisation qui se sont formés et des nombreux courants thématiques qui façonnent le paysage du marché.

Bien que les États-Unis demeurent un marché dominant, les écarts de valorisation entre les régions laissent entrevoir un possible rééquilibrage. L’Europe et les marchés émergents, malgré leurs risques, pourraient afficher une performance supérieure en termes relatifs si les attentes de croissance s’alignent sur la réalité.

Conclusion : quelques opportunités d’investissement pour 2025

Les investisseurs entament 2025 dans un contexte d’incertitude macroéconomique accrue, de politiques monétaires en évolution et de dynamiques sectorielles changeantes.

À partir des perspectives exposées dans cette analyse, nous développerons quelques idées de négociation et recommandations pour se positionner au cours de l’année à venir.

D’emblée, nous partageons l’avis consensuel sur certaines idées de négociation, compte tenu de notre scénario de base qui prévoit une croissance appréciable continue, un potentiel de surprises inflationnistes liées au commerce mondial et un climat général d’incertitude alors que s’amorce l’ère Trump 2.0.

Nos idées les plus consensuelles : capitaliser sur les tendances établies

  • Surpondération des actions américaines : les ÉtatsUnis demeurent la pierre angulaire des portefeuilles d’actions mondiales et devraient conserver leur couronne en 2025.
    • Bien que la domination des « Sept Magnifiques » s’atténue, les perspectives de bénéfices demeurent solides, les entreprises américaines continuant de profiter de la vigueur des dépenses de consommation, de marges stables et d’un contexte fiscal favorable.
    • Les gains de productivité et la résilience du marché du travail soutiennent une économie américaine robuste, même dans un contexte de resserrement monétaire.
    • Malgré des valorisations élevées, les avantages structurels des marchés américains — innovation, dynamisme et liquidité — en font une allocation privilégiée pour de nombreux investisseurs institutionnels.
  • Sous-pondération des obligations mondiales : nos prévisions macroéconomiques pour 2025 nous incitent à la prudence sur les obligations.
    • Nous anticipons une hausse des taux mondiaux en 2025, compte tenu d’un taux neutre potentiellement plus élevé et d’une persistance de l’inflation.
    • Les prix actuels des obligations intègrent déjà les attentes du marché en matière d’assouplissement, laissant peu de marge pour des gains supplémentaires, sauf en cas de détérioration marquée des perspectives macroéconomiques.
    • Nous prévoyons que les investisseurs privilégieront les titres de courte durée et protégés contre l’inflation comme couverture contre la volatilité des taux, réduisant ainsi la demande pour les actifs de longue durée.
  • Surpondération des investissements alternatifs : les actifs alternatifs offrent des possibilités thématiques intéressantes dans un monde en mutation rapide.
    • Les infrastructures et l’immobilier offrent des protections contre l’inflation et des flux de trésorerie stables dans un environnement de faible croissance.
    • Les stratégies axées sur les tendances macroéconomiques, la valeur relative et les approches neutres face au marché (comme les fonds de couverture, par exemple) sont bien positionnées pour tirer parti de la volatilité.

Idées à contre-courant : penser au-delà du consensus

Au-delà des idées plus consensuelles énumérées cidessus, notre analyse identifie quelques stratégies d’investissement à contre-courant qui méritent un nouveau coup d’œil à l’aube de 2025. Ces perspectives pourraient compléter nos vues consensuelles et servir de couverture contre les risques politiques et de marché que nous avons identifiés.

  • Surpondération des bons du Trésor américain : malgré notre recommandation de sous-pondérer les obligations mondiales, nous voyons une occasion de surpondérer les bons du Trésor américain, étant donné que le positionnement actuel se situe à des niveaux historiquement bas. Ce contexte suggère que le consensus est largement confiant dans le succès des réformes à venir et crée une occasion pour ceux qui parient sur des déceptions en matière de réformes.
    • Le risque de mouvement vers des valeurs sûres est élevé en raison des tensions géopolitiques ou de l’instabilité financière, ce qui pourraient entraîner une rotation vers les obligations d’État américaines de haute qualité.
    • Les obligations américaines de longue durée pourraient afficher une performance supérieure si la Réserve fédérale baisse ses taux plus agressivement que ce que le marché prévoit en 2025.
    • Les forces désinflationnistes pourraient continuer à dominer malgré les menaces de tarifs, alors qu’un ralentissement de la croissance mondiale, particulièrement en Europe et en Chine, pourrait soutenir les cours des obligations.
  • Position courte sur l’or : bien que l’or ait bénéficié des tensions géopolitiques et des craintes d’instabilité financière, les investisseurs à contrecourant pourraient identifier des occasions de prendre des positions courtes.
    • La résolution de principaux conflits, comme la guerre en Ukraine, pourrait réduire la demande de valeurs refuges à mesure que les risques géopolitiques s’estompent.
    • Un dollar américain résilient, soutenu par une croissance américaine plus forte et des taux réels plus élevés, pourrait peser sur les prix de l’or.
  • Position longue EUR/USD : la réputation mise à mal de la zone euro pourrait présenter des occasions pour les investisseurs prêts à adopter une position à contre-courant.
    • L’euro reste sous-évalué par rapport à ses moyennes historiques, même si les défis structurels persistent.
    • Les pressions politiques et budgétaires en Europe pourraient entraîner des réformes nécessaires, particulièrement sur les marchés du travail et en matière de politique énergétique
    • Les efforts de l’Europe pour diversifier ses relations commerciales et investir dans son autonomie stratégique pourraient soutenir la devise.
  • Position longue CAD/position longue USD et/ou position longue CAD/position courte EUR : le dollar canadien offre une occasion intéressante à contrecourant, soutenue par des facteurs tant structurels que cycliques
    • La Banque du Canada a baissé son taux directeur plus agressivement que la Réserve fédérale en 2024, limitant la baisse supplémentaire du CAD face au USD. Face à l’euro, la discipline budgétaire relative du Canada et ses liens commerciaux solides avec les États-Unis fournissent un soutien supplémentaire.
    • L’euro demeure sous pression en raison d’une faible productivité, du déclin démographique et de l’incertitude géopolitique persistante. Pendant ce temps, la résilience économique attendue du Canada positionne le CAD comme une alternative plus attrayante.
    • Ces positions comportent toutefois des risques importants. Premièrement, une faiblesse inattendue des marchés de l’énergie ou une correction brutale du secteur immobilier canadien pourrait mettre à mal cette position. Deuxièmement, des réformes budgétaires plus rapides que prévu en Europe ou une croissance plus forte que prévu aux États-Unis pourraient également limiter le potentiel de hausse du CAD.

Conclusion : les occasions abondent

L’interaction entre les changements de politiques, les dynamiques géopolitiques et les réalignements de marché mettra à l’épreuve les convictions et la capacité d’adaptation des investisseurs en 2025. Pour ceux qui sauront voir au-delà du bruit, les possibilités sont importantes — qu’il s’agisse de positions à contre-courant, de régions sous-évaluées ou d’investissements thématiques. Il pourrait y avoir des défis à relever, mais comme toujours, les investisseurs préparés et proactifs sauront se démarquer.

Positionnement mensuel

En termes de positionnement actuel du portefeuille, nous continuons de privilégier les actions par rapport aux liquidités et aux obligations, avec un accent particulier sur les actions canadiennes et américaines. Les perspectives de bénéfices pour ces deux marchés demeurent solides, et nous n’observons pas encore de ralentissement de la croissance des bénéfices qui influencerait négativement les valorisations.

Le sentiment du marché au sujet du Canada est relativement négatif, influencé par des perspectives budgétaires fédérales défavorables, des choix de politiques discutables, le risque de tarifs douaniers de la nouvelle administration américaine et un contexte politique incertain associé à un gouvernement sur son départ. Cela dit, les perspectives de croissance des bénéfices canadiens se sont nettement améliorées ces derniers mois, soutenues par l’assouplissement agressif de la Banque du Canada (175 points de base en moins de six mois, avec d’autres baisses à venir). Ces baisses de taux se répercuteront sur l’économie au premier semestre 2025, stimulant la demande. Si la menace des tarifs se concrétise, nous prévoyons que la Banque du Canada réagira encore plus vigoureusement en poursuivant son assouplissement. Les valorisations des actions canadiennes demeurent attrayantes par rapport aux autres marchés mondiaux, rendant les actions canadiennes attrayantes.

Dans une perspective à contre-courant, nous cherchons également le bon moment pour surpondérer le dollar canadien face à son homologue américain, puisque le marché des changes est extrêmement pessimiste quant aux perspectives du Canada. Bien que nous reconnaissions que le contexte a été difficile, nous pensons que le consensus des investisseurs est devenu trop unilatéral. Notre plan pour 2025 est de saisir opportunément la position inverse de ce consensus. Nous n’avons pas encore mis en œuvre cette stratégie dans les portefeuilles, mais nous comptons le faire lorsque nous estimerons avoir atteint le point de pessimisme maximal sur le Canada et que les catalyseurs d’amélioration seront devenus plus évidents.

Aux États-Unis, bien que les valorisations soient plus exigeantes, nous continuons de voir des perspectives de bénéfices favorables. La dynamique de déréglementation de Trump est largement intégrée dans les cours (notamment dans les secteurs qui en bénéficient, comme la finance), mais nous pensons qu’il existe encore un potentiel de hausse considérable pour les bénéfices en 2025. Les impacts du thème de l’IA sur la croissance globale des bénéfices américains ne fait que commencer. Tant que l’activité américaine reste conforme ou supérieure à la tendance, le contexte demeure favorable aux actions américaines.

Côté obligations, à moyen terme, nous pensons que les rendements plus élevés disponibles sur les actifs obligataires peuvent offrir une couverture efficace à un portefeuille centré sur les actions. Cependant, d’un point de vue plus tactique, nous maintenons notre sous-pondération dans les obligations en raison d’une croissance toujours soutenue et d’une inflation persistante.

Les perspectives de la campagne d’assouplissement de la Réserve fédérale sont devenues incertaines en raison de la résilience de l’économie américaine. Avec une croissance forte et une inflation légèrement supérieure à l’objectif, la Fed pourrait devoir reconsidérer sa position actuelle, ayant une incidence sur le paysage obligataire. Cette considération est devenue évidente dans les récentes communications de la Fed; sa conviction quant à de nouvelles baisses de taux significatives est désormais faible, et la banque centrale ne s’engage plus sur une trajectoire de taux d’intérêt beaucoup plus bas.

Ainsi, nous pensons que les taux obligataires resteront probablement confinés dans une fourchette à court terme. Nous ne prévoyons pas de pertes directes sur les instruments obligataires, mais du point de vue du rendement, nous préférons allouer le risque aux actions jusqu’à ce que nous ayons davantage de conviction qu’une baisse significative des taux d’intérêt et des rendements obligataires se profile à l’horizon.

Alex Bellefleur

Vice-président sénior, chef de la recherche, allocation d’actifs

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Sébastien Mc Mahon

Vice-président, allocation d'actifs, stratège en chef, économiste sénior et gestionnaire de portefeuilles

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