Macro & Stratégie - Septembre 2023

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Ce n’est pas différent cette fois

L’une de nos citations préférées du grand Warren Buffett va comme suit : « Ce que l’histoire nous apprend, c’est que les gens n’apprennent pas de l’histoire. » Et justement, l’histoire se répète cette année.

Les 18 derniers mois ont été le théâtre, à l’échelle mondiale, de l’une des hausses coordonnées des taux les plus agressives de l’histoire. Maintenant que nous arrivons (enfin) au bout du cycle de resserrement monétaire, nous pourrions être tentés de croire que cette fois-ci est différente et que la résilience des indicateurs macroéconomiques connexes nous assure d’un atterrissage en douceur. D’ailleurs, compte tenu de la « résilience de l’économie », le personnel de la Réserve fédérale (Fed) lui-même a écarté l’hypothèse d’une récession1. Son président, Jerome Powell, est allé jusqu’à dire que la banque centrale voyait « les prémices d’une désinflation sans coûts réels sur le marché de l’emploi ».

D’une part, force est de constater que les données récentes sont plus résilientes que prévu et qu’au cours du trimestre qui commence, les tableaux de bord n’afficheront probablement pas de voyants rouges signalant une récession. D’autre part, l’histoire nous démontre l’importance, plus que jamais, de rester prudents et de ne pas succomber à la tentation de voir l’économie à travers des lunettes roses.

Par exemple, aux États-Unis, le rythme de croissance du PIB pour le deuxième trimestre de 2023 s’élève à 2,6 % selon les dernières révisions. Fait intéressant, c’est exactement le rythme de croissance trimestrielle du PIB qu’on avait observé avant les récessions de 2008-2009, de 2001 et de 1948. Au trimestre juste avant la récession de 1969-70, la croissance s’élevait à 2,7 %. Et juste avant la récession de 1960, elle était de 9,3 %!

Nous savons tous que les effets des politiques monétaires se font sentir avec un décalage à la fois long et variable (consultez nos analyses à ce sujet ici). Nous savons également que l’humain est de nature impatiente. Réunies, ces conditions font en sorte que l’histoire se répète constamment. En effet, les manchettes portant sur un « atterrissage en douceur » ont tendance à se multiplier lorsque la Fed termine son resserrement, mais juste avant que les effets des hausses ne se répercutent sur l’économie.

On a beau entendre parler d’atterrissage en douceur, il faut se rappeler que le nombre de pays et de secteurs américains qui affichent une croissance continue de reculer. Bref, en matière de placement, il est important non seulement de garder l’esprit ouvert, mais aussi de porter attention aux données. Tant que des moteurs de croissance ne commenceront pas à émerger, notre perspective restera prudente.

Ce n’est plus une question d’inflation…

La lutte des banques centrales contre l’inflation bat son plein et à moins d’un revirement prématuré des principaux acteurs ou d’un autre choc inflationniste, elle devrait se terminer d’ici la fin de 2024.

Notre attention n’est plus sur les données mensuelles relatives à l’inflation, ni même sur la question de savoir si la Fed, la Banque du Canada ou la Banque centrale européenne hausseront encore les taux cette année, mais bien sur l’effet cumulatif du cycle de hausses et sur les signaux des indicateurs avancés pour 2024.

Selon les indices de surprises économiques et d’inflation de Citi, les surprises en matière d’inflation sont devenues pour la plupart négatives, sauf au Royaume-Uni, en Norvège, en Suède et au Canada.

À l’échelle mondiale, la dynamique récente de croissance et de pressions sur les prix laisse présager une baisse continue de l’inflation. Comme on peut le voir ci-dessous, le cycle de croissance et d’inflation se trouve résolument dans le quadrant ralentissement économique/baisse d’inflation. Comme nos indicateurs avancés pointent vers une croissance encore plus faible à l’échelle mondiale, on peut raisonnablement s’attendre à un recul de l’inflation et de la croissance.

Autre fait intéressant : si la croissance du PIB américain demeure résiliente, c’est en grande partie grâce aux dépenses de consommation et aux dépenses gouvernementales.

Nous croyons surtout que les grandes surprises positives de 2023 sont essentiellement attribuables au processus d’épuisement de l’épargne excédentaire des consommateurs américains, qui pourrait avoir lieu d’ici le début de 2024. La fin du moratoire sur le remboursement des prêts étudiants, qui, selon de nombreuses estimations, représente environ 18 G$ par mois, soit plus de 50 G$ par trimestre, pourrait inciter les consommateurs américains à modifier leurs habitudes de consommation et arrêter brusquement la croissance du PIB.

La croissance ininterrompue du déficit budgétaire aux États- Unis joue également un rôle. Parallèlement, les besoins financiers sont un facteur dans l’équation, et ils sont assortis d’une date d’échéance claire.

Au cours des dix premiers mois de l’exercice en cours, le déficit budgétaire américain a atteint 1,6 billions $, soit plus du double de celui de l’exercice précédent. Sur une période de 12 mois, les versements d’intérêts ont presque doublé pour atteindre quelque 650 G$.

La décote de Fitch peut être attribuable à ces chiffres, mais l’éventualité d’un défaut de paiement sur la dette du gouvernement américain ne nous inquiète pas, puisque le dollar américain est la principale monnaie de réserve du monde. Cela dit, nous croyons que la réduction du déficit commandera prochainement de nouvelles mesures. Si tel est le cas, les dépenses budgétaires ne seraient plus un moteur de croissance, mais bien un frein.

La Chine à la rescousse? Pas cette fois-ci!

Le plus grand atout de cette année a été la réouverture de l’économie chinoise, mais malheureusement, il s’agissait d’une carte décevante.

De nombreux investisseurs espéraient que cet événement post-COVID bouleverse le cycle macroéconomique mondial, mais comme nous l’avons expliqué plus tôt cette année (dans cette publication), il est survenu à un moment défavorable, alors que la demande mondiale de produits de fabrication était en repli.

Depuis que la Chine a brusquement mis fin à sa politique « zéro COVID » le 8 janvier, les nouvelles ont été pour le moins moroses. En plus d’Evergrande, dont la saga a commencé en 2021, d’autres promoteurs immobiliers sont sur le bord de la faillite (le dernier exemple étant Country Garden). Parallèlement, les villes ont du mal à rembourser des dettes de plusieurs billions de dollars2, et certaines banques parallèles menacent de faire défaut. Comme nous l’avons appris en 2008, ces événements pourraient provoquer une réaction en chaîne imprévisible au sein du système financier chinois.

Bien que la résolution de ces problèmes financiers demeure incertaine, il faut noter que les données macroéconomiques concrètes pointent vers le recul d’un nombre croissant de facettes de l’économie chinoise. Comme nous le savons déjà, les mises en chantier et les ventes de biens immobiliers se sont contractées depuis l’adoption de la réforme sur le logement du président Xi Jinping, qui a eu lieu avant la pandémie. (À ce moment-là, Xi avait déclaré que « les maisons sont faites pour y vivre, pas pour spéculer »).

Aujourd’hui, la faiblesse macroéconomique s’étend aux secteurs de la vente au détail, de la vente de voitures et des investissements en immobilisations. Les exportations souffrent elles aussi de l’affaiblissement de la demande mondiale, tandis que les importations sont en chute libre. Fait à l’appui, les exportations sud-coréennes ont chuté de presque 20 % année sur année.

Le cycle de crédit chinois reflète bien l’impact du pays sur l’économie et les marchés mondiaux, car c’est un bon indicateur avancé du cycle économique mondial et du rendement relatif des actions mondiales par rapport aux obligations mondiales. Bien que les autorités chinoises adoptent quelques mesures marginales pour maintenir le cycle du crédit (tout en soutenant le yuan par des opérations de marché ouvert), l’hypothèse de base est que l’impulsion du crédit continuera de s’estomper au cours des prochains mois, ce qui devrait avoir des retombées importantes sur la croissance et l’appétit pour le risque à l’échelle mondiale.

Les pays émergents : là où cette fois, c’est effectivement différent

Il est intéressant de noter que les banques centrales de certains pays émergents, comme le Brésil et le Chili, ont commencé à réduire leur taux directeur alors que les surprises en matière d’inflation sont devenues pour la plupart négatives. C’est ce qui explique le fait que notre indicateur de cycle de politique monétaire mondiale se dirige vers son creux.

En fait, le Brésil et le Chili ont commencé à relever leurs taux d’intérêt avant la Réserve fédérale et la Banque du Canada, et ce, de manière très vigoureuse, puisque leurs économies sont davantage touchées par les variations des prix des denrées alimentaires. La Banque centrale du Brésil avait une autre bonne raison de freiner l’inflation rapidement : elle est devenue indépendante l’année dernière et elle n’a pas l’habitude de maîtriser les pressions sur les prix.

Par le passé, les vifs resserrements de politique monétaire à la Fed étaient suivis de dévaluations déstabilisantes du côté des devises des marchés émergents, et ces événements ont parfois provoqué des crises de dette souveraine et des crises bancaires en Amérique latine et en Asie. Une étude récente de la Banque fédérale de réserve de Dallas3 montre qu’au cours du cycle actuel, les autorités des marchés émergents ont pris les devants, notamment en haussant les taux d’intérêt et en redoublant de discipline budgétaire, afin de protéger leurs économies contre les mouvements de capitaux.

Au cours du dernier cycle de resserrement, les devises des marchés émergents se sont dépréciées, mais dans une moindre mesure que les devises des économies avancées. La force relative des devises des marchés émergents est attribuable entre autres aux augmentations précoces de taux directeurs et à l’adoption de politiques telles que le ciblage de l’inflation, qui ont rehaussé la transparence et la crédibilité des politiques monétaires.

Dans les années 1980 et 1990, la quasi-totalité de la dette publique des marchés émergents détenue à l’étranger était libellée en devise étrangère. De ce fait, les économies de ces pays étaient vulnérables aux périodes de forte inflation et d’instabilité de leur propre devise. Toutefois, au cours des deux dernières décennies, la situation a évolué, poussée par un penchant national.

Enfin, les économies des marchés émergents détiennent de vastes réserves en devise étrangère — c’est-à-dire en actifs liquides — pour atténuer l’effet des sorties de capitaux, ce qui leur permet de financer les déficits de la balance courante et de refinancer les dettes arrivant à échéance. Tous ces éléments se traduisent par un profil de risque assez différent pour les pays émergents, qui démontre que dans ce cas-ci, il est vrai que « cette fois, c’est différent ».

Comment interpréter tout cela?

D’abord, il y a trop de signes indiquant que les effets de la politique monétaire font leur chemin dans la machine économique pour que, comme tout le monde, nous anticipions un atterrissage en douceur. Les antécédents de la Fed en matière d’atterrissage sont d’ailleurs peu reluisants4, d’autant plus que l’ampleur et la rapidité du dernier cycle de resserrement, à elles seules, nous incitent à la prudence.

Deuxièmement, nous nous demandons toujours d’où viendra la croissance, et la réponse reste extrêmement difficile à trouver. Il est extrêmement rare que « cette fois, ce soit différent ». En fait, les choses finissent par se dérouler à un ordre et à un rythme différents. Cela dit, il y a de bonnes raisons de s’attendre à ce que le ralentissement ne soit pas trop grave, surtout quand on pense aux progrès considérables des pays émergents pour éviter que leurs économies ne subissent le poids du cycle mondial des politiques monétaires.

Conclusion

Actions

Dans l’ensemble, notre positionnement n’a pas changé ce mois-ci, bien que nous voyions apparaître une occasion attrayante d’ajouter de la valeur avec une transaction de rotation sectorielle.

La surperformance des titres technologiques américains résume bien l’année jusqu’à présent, plus spécifiquement celle des « sept magnifiques » liés au thème de l’IA (Alphabet, Amazon, Apple, Meta, Microsoft, Nvidia et Tesla). Bien qu’il soit toujours risqué de rejoindre une tendance qui a un momentum aussi fort, ces titres ont redonné une partie de leurs gains depuis la fin juillet, ouvrant la voie à une stratégie de convergence.

Lorsqu’on analyse l’indice, on remarque que sa concentration a récemment atteint un sommet historique. Par conséquent, la surperformance du S&P 500 par rapport à sa version équipondérée a bondi à un niveau qu’on n’avait pas vu depuis l’épisode de mars 2020 et pendant la bulle Internet de 1998- 2000.

Nous avons donc effectué une transaction tactique en prenant une position longue sur l’énergie et une position courte sur la technologie, qui vise à profiter de la rotation entre la technologie (croissance) et l’énergie (valeur). La performance relative de ces deux secteurs depuis le début de 2023 suit une image miroir, faisant de l’énergie une bonne candidate pour une transaction d’arbitrage par paires.

Il existe quelques catalyseurs susceptibles de déclencher ce mouvement de convergence. Les taux réels à 10 ans aux États- Unis se rapprochent des 2 %, soit le niveau le plus élevé depuis la crise financière de 2008; mais surtout, une augmentation d’environ 3 % depuis le creux a été atteint au début de 2022, exerçant une pression considérable sur la valorisation des actions de croissance.

Plus spécifiquement, depuis le sommet de juillet, nous avons aussi observé une nette détérioration de l’ampleur du marché (mesurée par le pourcentage de titres qui s’échangent audessus de leur moyenne mobile sur 50 jours) dans le secteur de la technologie, alors qu’elle a atteint 100 % dans le secteur de l’énergie.

Du côté de l’indice, l’expansion des multiples s’est poursuivie à l’échelle mondiale au cours des trois derniers mois et les anticipations de croissance des bénéfices pour les douze prochains mois ont été révisées à la hausse dans la plupart des régions. Bien que la majorité des régions aient vu leurs anticipations de croissance des bénéfices diminuer au cours de la dernière année, il serait prudent d’avoir plus de visibilité sur la diffusion de la politique monétaire avant de bonifier les perspectives de bénéfices futurs.

Lorsqu’on examine les alternatives aux actions, ou aux actifs risqués en général, il devient évident que la concurrence est devenue très forte et que les exigences sont encore plus élevées pour allouer du capital aux actions ordinaires.

Comme discuté ici, le marché monétaire offre maintenant un rendement annualisé de plus de 5 % avec un risque quasi nul. L’attrait des fonds de marché monétaire doit donc être pris en compte lorsque des décisions de répartition d’actifs sont prises. En effet, les actifs totaux des fonds de marché monétaire américains continuent de croître et surpassent maintenant les 5,5 billions $, un apport de capitaux de 1 billion $ au cours des douze derniers mois seulement.

En ce qui a trait à la valorisation relative des actifs, la prime de risque sur actions mesurée avec le taux à 3 mois est maintenant en territoire négatif et nous indique que les actions sont à leur niveau le plus cher par rapport à l’encaisse depuis l’éclatement de la bulle Internet. Même si la prime avait atteint des niveaux beaucoup plus bas avant que la bulle n’éclate, cette mesure utile démontre que le potentiel de hausse relative des actions est devenu limité sur une base historique.

En résumé, ce qui est nettement différent à l’heure actuelle par rapport à la période d’après-crise financière, c’est que la liste d’actifs sûrs intéressants est devenue très longue. Il s’agit d’un virage à 180 degrés par rapport à la période récente qu’on désignait par l’acronyme « TINA » (there is no alternative), où les options d’investissements à faible risque se faisaient rares. Nous sommes maintenant dans l’ère « TAPA » (there are plenty of alternatives), où les investisseurs trouvent aisément des alternatives aux actions.

Revenu fixe

Une importante hausse des taux obligataires s’est opérée au cours des derniers mois, effaçant la majeure partie du rendement accumulé par les principaux indices de revenu fixe depuis le début de l’année.

Selon notre analyse, chacune des trois composantes de base est à l’origine de ce mouvement haussier : des attentes de croissance plus élevées compte tenu de l’adhésion grandissante au scénario d’atterrissage en douceur, un rebond des anticipations d’inflation comme en témoigne le taux d’inflation neutre (breakeven), et des prévisions croissantes pour des taux qui resteront élevés sur une plus longue période, comme le reflète la prime de risque.

La hausse a été particulièrement importante pour les taux à 30 ans des deux côtés de la frontière, exerçant une pression encore plus grande sur les autres classes d’actifs. En effet, il est maintenant possible d’obtenir un taux à long terme de 4,5 % en prêtant aux emprunteurs les plus sûrs de la planète. Curieusement, les marchés ont mal réagi à un niveau similaire des taux longs en 2022, mais semblent bien les absorber cette fois-ci.

Même si l’évolution récente du marché a été préjudiciable à un positionnement à durée longue, nos perspectives macros suggèrent toujours que le prochain mouvement important des taux souverains sera à la baisse.

Dans ce contexte, une reprise des obligations du Trésor estelle toujours envisageable pour la deuxième moitié de 2023? Le timing est toujours délicat sur les transactions de renversement de tendance, mais le niveau de risque actuel nous apparaît favorable à l’ajout de durée sur faiblesse.

Comme mentionné précédemment, les taux réels sont élevés d’un point de vue historique et offrent un point de départ attrayant pour les rendements à long terme espérés des titres du Trésor. La hausse rapide des taux nominaux a aussi engendré un signal de survente des titres du Trésor, suggérant un épuisement potentiel de la tendance récente. Pour que les taux fassent demi-tour et amorcent un repli, il faudra sans doute voir une série de nouvelles décevantes sur le marché de l’emploi et les dépenses de consommation aux États-Unis, ainsi que des signes que le scénario de croissance résiliente et de désinflation perd de son éclat.

La Réserve fédérale a-t-elle suffisamment resserré sa politique monétaire? Il s’agit d’une question légitime alors que le resserrement cumulatif n’a toujours pas eu son plein impact sur l’économie. En termes techniques, nous devons comparer le taux réel des fonds fédéraux (ajusté pour le taux d’inflation neutre à 10 ans) à l’estimation du taux réel neutre mesuré par la Fed, communément appelé R*.

En examinant la situation actuelle, on observe que le taux réel des fonds fédéraux est nettement plus élevé que R* et que la politique monétaire est à son niveau le plus restrictif depuis le milieu des années 90 (ou depuis que nous disposons de données sur le taux d’inflation neutre à 10 ans). Cela se reflète aussi dans la forme de la courbe des taux, dont l’inversion est la plus marquée sur cette même période.

Il est possible de faire une analyse différente en regardant le message envoyé par la célèbre règle de Taylor. Dans ce cas, pour chaque version majeure de la règle que nous utilisons, il apparaît justifié de hausser les taux davantage compte tenu de la situation de l’inflation et du marché de l’emploi, mais la Fed est essentiellement arrivée à destination. Souvenons-nous que la règle de Taylor est un guide qui nous dit comment la Fed devrait définir sa politique, mais elle évolue rapidement. Il serait peu pratique pour le FOMC d’adopter une approche aussi réactive que celle suggérée par la règle.

Ainsi, la politique monétaire semble effectivement plutôt restrictive, et les commentaires de la Fed indiquent que le cycle de resserrement tire à sa fin. Historiquement, le sommet atteint par le taux des obligations du Trésor à 10 ans a eu tendance à coïncider avec le sommet des anticipations de taux de la Fed (dans deux ans, en utilisant le huitième contrat). Selon nous, la Fed est au plus à une ou deux hausses d’avoir complété son cycle de resserrement. Par conséquent, le niveau actuel des taux offre un point d’entrée attrayant pour la mise en place d’une position centrale dans tout portefeuille.

Produits de base et devises

Nous maintenons une opinion favorable des produits de base en général et nous prévoyons une surperformance de cette classe d’actifs par rapport aux actions américaines d’ici la fin de l’année.

Notre argument principal repose sur le fait que les prix des produits de base se sont repliés de manière importante au cours de la dernière année alors que l’économie mondiale perdait de son élan, et qu’ils semblent maintenant avoir atteint un creux. De plus, leurs prix contrastent nettement avec la valorisation des actions américaines.

Selon certaines estimations, le niveau actuel de l’indice Bloomberg des produits de base (BCOM) indique une probabilité de récession de 60 % au cours des 12 prochains mois, contre seulement 20 % pour les actions américaines. Un écart aussi important ouvre la voie à des transactions de valeur relative attrayante, car une position longue sur les produits de base associée à une position courte sur les actions américaines pourrait générer un rendement positif, peu importe que l’atterrissage se fasse douceur ou qu’il soit brutal.

Si on examine le pétrole, le sous-investissement généralisé dans les capacités pendant la période de COVID continue d’assurer un prix plancher pour la ressource. Du côté de la production américaine, le nombre d’appareils de forage en service a glissé une fois de plus au cours des derniers mois, suggérant que le prix du WTI pourrait reprendre sa trajectoire haussière dans un marché sous-approvisionné. La décision de l’Arabie saoudite au début août de prolonger les réductions de production d’un million de barils par jour devrait aussi soutenir les prix mondiaux à court terme.

Finalement, le dollar américain a continué à prendre de la vigueur par rapport aux principales devises au cours du dernier mois, alors que les surprises économiques aux États-Unis demeurent meilleures qu’en Europe. Comme nous anticipons des vents contraires pour les données américaines en deuxième moitié d’année, le billet vert pourrait renouer avec sa tendance baissière et, en conséquence, un rebond du dollar canadien pourrait survenir dans les prochains mois.

Sébastien Mc Mahon

Vice-président, allocation d'actifs, stratège en chef, économiste sénior et gestionnaire de portefeuilles

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